Kit de survie en milieu masculiniste

Projet

Le web est un monde vaste, bizarre, utile, dangereux, rassurant, paradoxal. Il renvoie l’image de notre réalité tout en étant un endroit où chacun.e peut créer son univers personnel ou collectif. Dans ces univers entrelacés, des groupes se créent ; des individus se réunissent autour d’intérêts communs, discutent, débattent, trouvent une plateforme d’expression personnelle, allant parfois jusqu’à créer de véritables sous-cultures en ligne. Certains groupes attirent néanmoins l’attention sur leurs activités ou les sujets qu’ils abordent, et ce qui n’était alors qu’un territoire d’expression peut devenir l’ombre d’une menace pour une partie de la société. C’est le cas pour les incels (INvoluntary CELibates). Marion Thomas a cherché à comprendre le phénomène ; sa pièce “kit de survie en milieu masculiniste” met en perspective leur histoire avec la place des femmes dans l’espace public. Entre théâtre sonore, récits féministes, et bienveillance, elle nous raconte.

Nous sommes en 2012. Marion, à son habitude, passe du temps sur son ordinateur à jouer ou parcourir les forums Reddit. Le site de discussions est alors à l’apogée de sa popularité en raison de la diversité des sujets (catégorisés dans des “subreddits”) et pour sa capacité à renforcer les liens communautaires entre les internautes. C’est dans ce contexte qu’elle découvre les incels, un cercle composé principalement des jeunes hommes, qui confessent leurs souffrances et frustrations d’être encore vierges et célibataires. Par goût du bizarre et par curiosité, Marion commence à suivre ces groupes en se demandant pourquoi ils ont l’impression que leurs problèmes sont typiquement masculins. Ils s’échangent des conseils, et leur propos, bien qu’accompagnés de misogynie, sont inoffensifs. Avec le temps, elle se prend de tendresse pour eux, car pour elle, ce ne sont que des adolescents qui souffrent qui se retrouvent pour partager leurs névroses et leur solitude face à une société dans laquelle ils ne trouvent pas leur place.

Assez rapidement, les incels prennent les traits d’une sous-culture en adoptant des comportements et normes propres. Certains groupes admettent des membres après un rite d’intégration dans lequel le nouveau venu est flagellé par ses pairs, d’autres possèdent une devise. Ils se catégorisent en fonction de leurs attributs physiques (“fatcel”, “shortcel”, etc), et leur sujet favori reste le rejet des femmes qu’ils tiennent pour responsables de leur souffrance. L’expression “incel” a pourtant été formulée pour la première fois par une journaliste américaine pour décrire sa situation, un paradoxe que peu de personnes connaissent. La vision qu’ils ont des femmes ressemble beaucoup à l’image véhiculée dans les médias de masse : elle n’est là que pour être belle et servir les hommes.

Invisible, Marion se pose en observatrice et fait connaissance avec ces personnes dans la distance. Mais un premier événement choquant la pousse à sortir de son mutisme ; quand l’un des incels publie un message suggérant qu’il est prêt à mettre fin à ses jours, la communauté déverse ses insultes teintées de virilisme. Marion prend la parole, elle rassure en se faisant passer pour un homme âgé, qui a lui aussi été “en retard”, mais qui a fini par trouver sa compagne avec qui il vit maintenant heureux. Elle fera le pas plusieurs fois quand elle jugera que son intervention est nécessaire.

Puis la violence se fait de plus en plus visible ; le 23 mai 2014 un fichier texte appelé my twisted world tourne sur les forums, c’est en fait le journal intime et autobiographique de l’incel américain Elliot Rodger. Dedans, il raconte le divorce marquant de ses parents, la colère qu’il éprouve à l’égard de sa mère, son obsession pour la musculation et les vêtements de luxe. Il y partage surtout sa vision haineuse des femmes, et de certains hommes ; pour lui, les mouvements féministes des années 1960 prônant la libération sexuelle sont la racine du désespoir des incels. Leur émancipation financière et professionnelle leur confère plus de liberté dans le choix de leurs partenaires, ce qu’elles n’auraient pas eu avant. Alors les hommes qui plaisent aussi posent problème, puisque les femmes ne sélectionnent les hommes que sur la base de leur physique et de leur situation matérielle. Elliot les surnomme “chad”, en référence au stéréotype du quarterback, grand blond musclé, roi du bal de promo. Il relate également comment il aborde les femmes qui marchent dans la rue, fenêtre ouverte au volant de sa voiture de luxe, et son indignation face aux silences ou refus, qu’il considère comme des affronts à sa gentillesse. Il ne comprend pas le manque de reconnaissance des femmes pour tous les efforts qu’il accomplit afin de devenir le parfait “gentleman”.

Ce jour-là, à Isla Vista, Elliot Rodger, 22 ans, passe à l’acte. Il poignarde ses colocataires avant d’aller boire un café le temps de partager son manifeste sur internet, puis se rend à la maison de la sororité Alpha Phi dont les membres, prises de peur, refusent d’ouvrir la porte. Il se retourne et ouvre le feu sur les personnes qui sont à sa portée dans la rue avant de remonter au volant de sa voiture d’où il continue de tirer sur des passant.e.s. La police le rattrape mais avant de réussir à l’arrêter, Elliot se donne la mort. Son manifeste témoigne de la préméditation de ces meurtres, le sien inclus.

Marion parvient à télécharger le manifeste et les vidéos de la chaîne YouTube d’Elliot avant leur disparition totale d’internet, ils serviront de support pour son futur projet. Quand elle prend connaissance des documents, ses questionnements prennent une nouvelle tournure : statut économique et social mis à part, les jeux et internet ont été un refuge commun à leur adolescence solitaire, alors pour quelle raison a-t-elle évolué et s’est épanouie tandis que lui a cristallisé ses frustrations et amplifié son obsession ? Sans formaliser un projet artistique, cette première problématique marque le début de la recherche de Marion.

En 2018, elle se met à écrire. En 4 ans, les mouvements se sont radicalisés ; alors qu’Elliot incarne maintenant un martyr, “gentleman suprême” auquel les incels prêtent allégeance, les femmes deviennent perfides et les discours de plus en plus perturbants. Certains groupes objectifient les femmes au point de prôner la légalisation du viol, et normalisent la violence en ligne et en réalité. Les conseils se prêtent pour effrayer et pirater les ordinateurs ou les téléphones de leur cible, et dans le pire des cas, commettent des attentats masculinistes. Mais Marion ne souhaite pas apporter de réponse, elle constate et met en perspective leur expérience avec la sienne.

En 2020, les choses se concrétisent. L’artiste répond à un appel à projets dédiés aux pièces de théâtre innovantes diffusé par Les Subsistances à Lyon, et le centre Grütli de Genève. Ces opportunités lui permettent de réfléchir à la façon de mettre en parallèle l’expérience féminine de l’espace public avec le ressenti de rejet d’Elliot Rodger. En plein confinement, elle tombe dans une spirale obsessionnelle dans laquelle elle recherche ses victimes sur les réseaux sociaux, les femmes ciblées par les incels, au point de recevoir un rappel à l’ordre de la part de ses proches. Alors elle se recentre et rédige un texte focalisé sur l’histoire du “gentleman” tout en relatant ses propres anecdotes ou celles de ses amies de leur expérience urbaine, ces micro-agressions que les femmes vivent au quotidien. Dans son récit, elle réussit à faire transparaître cette tendresse qu’elle a d’abord eu pour les incels, et en même temps le sentiment de sur-vigilance d’une femme qui marche dans la rue. Et c’est justement la rue qui devient la scène, dans laquelle elle invite les spectateur.rice.s à la suivre tout en écoutant l’enregistrement de son texte au cours d’une ballade sonore. Elle l’intitule kit de survie en milieu masculiniste.

Pour la mettre en place, Marion collabore avec l’artiste chercheuse et metteuse en scène Maxine Reys, et la créatrice sonore Audrey Bersier. À l’aide d’un micro-binaural, elles ont enregistré les sons urbains pour recréer des moments spécifiques, comme une camionnette qui nous frôle, dans le but de créer un sentiment d’insécurité chez la personne qui l’écoute, ce qui la.le rapproche le plus de la réalité de la femme dans la rue. Avec l’aide également d’un.e architecte urbaniste, elles tracent un parcours urbain sensoriel qui dure 45 minutes. 

Au début de la pièce, les spectateur.rice.s reçoivent un mp3 et un casque et sont invité.e.s à suivre l’une des comédiennes. Ils.elles commencent dans un lieu ouvert, la comédienne se retourne, leur sourit, leur donne un sentiment de sécurité. Ils.elles écoutent l’enregistrement et ont l’impression que c’est elle qui leur parle. Au fil de la pièce, elle accélère, les perd dans des ruelles plus étroites, leur fait croire qu’ils.elles la suivent et qu’elle n’en a pas envie, pour accentuer le sentiment d’insécurité et mettre en relief la responsabilité partagée de nos comportements dans l’espace public. Ils.elles finissent dans un espace aéré où chacun.e est libre de voguer et où la voix de Marion clôt la pièce par la description et la liste des attentats d’incels. Puis les comédiennes invitent les spectateur.rice.s à partager un moment d’échange dans une salle de théâtre, leur offrent une boisson, des chocolats en forme de pénis et un autocollant d’Ada Lovelace, mère du tout premier programme informatique sans quoi les incels ne pourraient pas se réunir.

Elles distribuent également trois livrets ; le premier contient des extraits de forums incel, le deuxième des extraits de blog féministes sur les incels, et le troisième une photo du visage d’Elliot Rodger. Marion n’a pas voulu prendre la responsabilité de montrer son visage aux spectateur.rice.s et a préféré leur laisser le choix d’ouvrir ce dernier. Selon elle, cela participe au processus d'héroïsation des criminels au lieu de se focaliser sur les victimes dont on oublie toujours le nom. Le public peut ensuite échanger sur leur ressenti, poser des questions à l’artiste, reconstituer le puzzle ensemble. Elle a préféré laisser chacun.e se faire sa propre idée en leur donnant l’opportunité de comprendre chaque parti.

 

Jusqu'à aujourd'hui, parmi le public du kit de survie, beaucoup de féministes, quelques hommes qui ne trouvent pas le récit suffisamment incisif, mais aussi deux incels. Le premier connaissait bien l’histoire d’Elliot Rodger, a compris que Marion ouvrait la porte de l’empathie en essayant de comprendre la mythologie derrière leur mentalité, et n’a pas émis de critique particulière. Le deuxième qui est venu avec un sentiment de frustration, s’est ému des histoires, réalisé qu’il existait un pan extrémiste au mouvement, et est reparti en laissant l’étiquette incel derrière lui, une victoire pour l’Art qui n’a pas de prix.

Pour chaque série de représentations dans une nouvelle ville, les artistes recréent un nouveau parcours. Jusque là, elles ont présenté la pièce à Zurich, Berne, Lausanne, Nantes, Lyon, mais aussi pour Fringe Festival à Edinburgh en 2022, et seront de retour en France au festival d'Avignon cette année avant de s’envoler pour l’Estonie. Pour les besoins des voyages, l’enregistrement est traduit en anglais et en allemand.

Kit de survie en milieu masculiniste est un projet puissant. Il prouve que la création artistique peut jouer un rôle déterminant dans notre perception de la société, et réussir à modifier les rapports humains. 

Grâce à sa sensibilité et son empathie, Marion Thomas a su créer un environnement bienveillant dans lequel elle a pu rendre hommage à toutes les femmes.

Artiste

Credit photo : Maxime Devige

“En tant qu’artiste j’ai l’impression que l'œuvre doit prendre le chemin de la subjectivité, de l’histoire, c’est un endroit de militantisme sans non plus imposer une façon de penser.” Les artistes ont toujours abordé des sujets universels tels que les émotions ou l’identité, ainsi que les problématiques contemporaines à leur époque. Pourtant les œuvres d’art ne sont pas conçues dans le but d’apporter une réponse, mais plutôt pour créer et rendre visible une certaine perspective liée au sujet abordé. Dans son kit de survie en milieu masculiniste, Marion Thomas a choisi de toucher à des thèmes sociétaux complexes et sensibles, simplement en mettant en parallèle les histoires d’autres individus avec la sienne. Ses projets sont en réalité le résultat de longues réflexions menées au fil des ans mêlées à sa propre introspection.

Issue d’un milieu populaire, Marion grandit à Évry. Dès l’âge de cinq ans, elle commence le théâtre pour pallier ses difficultés à s’exprimer, mais perd son intérêt à l’adolescence. Solitaire et renfermée, elle se réfugie dans la littérature et les jeux vidéos pour lesquels elle se passionne toujours aujourd’hui. Elle reçoit sa première console à six ans et passe beaucoup de temps sur internet à lire et se divertir dès qu’elle reçoit son premier ordinateur. Vers ses treize ans, son frère l’initie aux jeux en ligne. Avec son casque et son micro, elle se branche sur Counter Strike mais face aux insultes misogynes violentes des autres joueurs, elle baisse rapidement les bras. Les filles ne sont clairement pas acceptées pour le simple fait d’être des filles, aussi, et à chaque fois qu’elle apparaît dans le jeu, Marion se fait éliminer à répétition ne lui laissant que quelques secondes de vie. Elle continue alors de jouer, mais en local, sans interactions avec la communauté virtuelle.

Les études supérieures permettent à Marion de sortir de son milieu social, et de s’ouvrir culturellement à un monde qui lui semble peu accessible jusque-là. Elle quitte la région parisienne pour la première fois au moment d’aller faire ses études à la fac de Lettres de Nantes d’où elle ressort diplômée d’un master en recherche théâtrale. Via la littérature spécialisée sur le théâtre de la foire du XIVe siècle, elle renoue avec son domaine. Pendant longtemps, elle ne s’était pas autorisée à reprendre ce qu’elle avait abandonné étant plus jeune, et elle se remet à jouer la comédie. Après les études, elle intègre des compagnies de théâtre et enchaîne quelques projets, notamment une pièce interactive dans laquelle le seul personnage est une femme tiraillée entre la nécessité d’adopter un mode de vie durable et autonome, et sa passion pour les jeux vidéos. Nous apprenons alors que les jeux vidéo peuvent servir à s’organiser en collectif et créer des imaginaires communs. Le public est branché sur écran à partir duquel il peut choisir un scénario et ainsi influencer la narration. La pièce fait évidemment écho au vécu de Marion, et très vite, elle réalise que l’écriture des sujets l’intéresse, ainsi que de jouer dans ses propres pièces.

Elle passe toujours beaucoup de temps sur internet qui devient essentiel dans son processus de création et principale source d’inspiration. Elle s’intéresse à T.A.Z: Temporary Anonymous Zone, un ouvrage d’Hakim Bey dans lequel il décrit un internet utopique dans lequel la société civile s’organise pour lutter et s'émanciper du capitalisme. Elle se met alors à suivre l'évolution de groupes alternatifs comme les fameux hacktivistes Anonymous sur la plateforme 4chan, ou les body hackers connus pour implanter des corps étrangers dans le leur à titre expérimental et avec une vocation open source, notamment Sapiens Anonym. C’est en partant à la découverte de toutes ces sous-cultures qu’elle tombe sur les incels, le groupe avec lequel elle va passer le plus de temps.

Après cette période de petits projets, elle s’installe à Lausanne où elle reprend un master de mise en scène, elle y passe quatre ans. Son expérience de l’espace public est différente de celle de la France, elle juge la société civile suisse plus à l’initiative quand il s’agit de prendre la défense des femmes. Au sortir du master, elle entame l’écriture de sa toute première pièce kit de survie en milieu masculiniste. Comme nous le savons, nous sommes en 2018, et Marion jusque-là, a suivi l’évolution des incels à travers les forums Reddit. Elle revient sur son expérience traumatisante des jeux vidéo en ligne et se compare à Elliot Rodger qui lui, s’était intégré dans une large communauté virtuelle grâce à World of Warcraft. Si leurs seules différences étaient le milieu socio-économique et le genre, leur expérience respective de la vie sociale semblait plutôt similaire.

Marion réfléchit beaucoup à la violence et aux troubles mentaux ; les femmes ont plus souvent tendance à intérioriser, recourir à l’automutilation par exemple, alors que les hommes extériorisent. L’écrivaine et activiste Rebecca Solnit, dont elle s’inspire, souligne que même si Elliot Rodger avait des problèmes psychologiques qui l’ont poussé au bout de ses pensées, il serait erroné de croire que son geste est isolé. D’autres avant et après lui ont fait le pas pour les mêmes raisons. Parce que nous partageons tou.te.s une culture dans laquelle il est profondément ancré que l'homme mobilise sa force physique, et que le patriarcat dans l’air ambiant de notre société divise les femmes et les hommes entre statut de victime et de bourreau. D’une certaine manière, légitimer la dimension systémique du geste d’Elliot permet de faire bouger les frontières du problème global.

La misogynie est donc partout, mais internet est particulier dans le sens où il a permis de propager et donner une place spéciale aux discours extrêmes, et Marion l’a bien vécu. Bien que les femmes s'affirment maintenant de plus en plus dans les communautés de gamers, elles continuent encore de subir des raids masculinistes. La période du Covid a contribué à accentuer ce phénomène et radicaliser des comportements inquiétants, le cyberharcèlement a pris le relai et les femmes sont toujours les premières victimes des discours de haine en ligne. Mais il y a 50% d’hommes sur la planète, alors Marion sait que nous devons tou.te.s faire l’effort de travailler ensemble pour assurer plus d’inclusivité. Elle sait aussi que forcer une idée sur un.e individu.e n’est pas la clé du changement des mentalités, aussi elle s’emploie à créer un espace accueillant à travers ses pièces où l'empathie est de mise, et où chacun.e peut repartir avec sa propre idée du sujet. D’un point de vue personnel, l’écriture de ce projet lui permet de s’exorciser pour enfin passer à autre chose.

De retour à Nantes, elle revisite le sujet de la masculinité cette fois à travers le musc, ingrédient tant convoité depuis des siècles pour la confection de parfums et pour ses supposées propriétés aphrodisiaques puissantes. C’est en réalité la glande du chevrotain porte musc, animal classé “vulnérable” à cause du braconnage. Ce projet se présente sous la forme d’un escape game qu’elle conçoit pour l’école d’architecture de Nantes. Le thème principal est la préservation de la biodiversité qu’elle reprend plus récemment dans un nouveau projet sur les merlus. Bien que l’on ne connaisse pas beaucoup de choses sur ce poisson, il est l’un des plus consommés en France. Pour donner une idée de l’ampleur de la situation, il est difficile de les trouver plus vieux de 5 ans alors qu'ils peuvent en vivre 20.

Pour ce projet, un groupe de scientifiques a contacté Marion. Ils.elles créent des algorithmes pour suivre les variations de la population de poissons dans les océans, mais pour se faire, ils ont besoin de l’aide des pêcheur.e.s. Les données partent ensuite au conseil européen qui va ajuster sa politique de pêche pour justement éviter la surpêche. Cela implique forcément un impact négatif sur les pêcheur.e.s, qui en retour sont réticent.e.s à communiquer avec les scientifiques. C’est là que Marion intervient ; elle va tenir un journal de bord lors des rencontres entre pêcheur.e.s et scientifiques, qui fera ensuite l’objet d’une pièce de théâtre autour du merlu, duquel elle s’est prise d’affection entre-temps. Il fait partie des espèces de la biodiversité “non charismatiques”, c'est-à-dire qu’il n’est pas suffisamment populaire comme le dauphin ou le tigre dans notre imaginaire pour favoriser des subventions dans le cadre des activités de préservation. Quelque part les merlus et les incels ont cela en commun ; ils manquent du charisme nécessaire pour vivre en paix et éveillent un sentiment de tendresse chez Marion.

Credit photo : Maxime Devige

Marion Thomas choisit des thématiques contemporaines complexes et délicates, sujettes à débats, qu’elle aborde toujours de façon introspective.

En partageant son regard bienveillant, elle transmet des messages puissants et parvient à mouvoir les frontières des préconceptions avec lesquelles nous vivons.

Artiste
Marion Thomas

Compagnie de théâtre
Frag compagnie